Le Journal de NOTRE EPOQUE

Journal béninois d’investigation, d’analyses et de publicité – Récépissé N° 953/MISPCL/DC/DAI/SCC du 27 mars 2007

Crise sanitaire : comment Amazon joue l’esquive

Malgré les engagements de respect des mesures barrières, les conditions de travail dans les entrepôts d’Amazon restent difficiles d’un point de vue sanitaire. Le leader du e-commerce a beau avoir rassuré Bruno Le Maire, il compte traverser l’épreuve du Covid-19 sans rater le boom de commandes enregistrées.

Les premières secousses managériales liées à la crise du coronavirus ont atteint la strate dirigeante d’ Amazon. Le géant du e-commerce est désormais décrié dans plusieurs pays en raison de sa volonté de suivre une seule ligne, “business as usual”, malgré les conditions de travail requises pour écarter la menace du Covid-19. La filiale Amazon France Logistique a perdu l’une de ses têtes d’affiche le 23 mars. Ana Fernandes, directrice des opérations du site de Saran, a, contre toute attente, annoncé en interne sa démission pour “raisons personnelles et familiales”. Elle était arrivée dans le groupe il y a dix-huit mois. Selon des sources internes, elle paie son refus d’intégration d’intérimaires supplémentaires pour faire face à l’absentéisme des salariés pour raisons sanitaires. Quelques jours plus tôt, le directeur des opérations en Europe, Roy Perticucci, avait fait connaître son départ du groupe. Son remplaçant doit être annoncé d’un jour à l’autre.

Mise en quarantaine

Dans l’Hexagone, le leader du e-commerce vient (enfin) de nommer son gestionnaire de crise, il s’agit d’ Alexis Brianceau, directeur du site de Sevrey, près de Chalons. Un chantier colossal attend le Monsieur Covid-19 France d’Amazon, d’autant que les difficultés et les frictions se multiplient d’un entrepôt à l’autre, parmi les six grands sites logistiques que compte le groupe en région. Le site de Saran (Loiret) a ainsi reconnu, mercredi 25 mars, qu’un premier cas de Covid-19 avait été identifié. Les 32 cas contacts ont ensuite été répertoriés et arrêtés pour une durée de quatorze jours par l’employeur.

Les conditions de travail dans les entrepôts opposent assez vivement directions locales et représentants du personnel. Mardi 24 mars, le conseiller politique de Bruno Le Maire, Charles Sitzenstuhl, a été destinataire d’une série de photos envoyées par la CFDT. Celles-ci sont destinées à montrer que les annonces publiques d’Amazon d’assurer en priorité les commandes des produits de première nécessité peuvent être prises en défaut. Les clichés témoignent aussi des conditions dans lesquelles les employés de la zone de “picking” – réception et envoi des colis – continuent d’opérer malgré les annonces de mesures barrière. Le jeune (31 ans) et discret conseiller du ministre de l’économie n’a pas répondu au courriel de la CFDT.

Des intérimaires à la rescousse mais sans masques ni gants

Autre site en proie à des escarmouches, celui de Montélimar. Le taux d’absentéisme des CDI y est désormais proche de 50 %, compte tenu des droits de retrait exercés par une partie des salariés et des autres motifs d’absence déclarés (garde d’enfants). Pour pallier l’absence d’une partie du personnel, le logisticien a fait appel à deux agences d’intérim, dont l’antenne locale d’ Adecco. Selon plusieurs témoignages recueillis par La Lettre A, les nouvelles recrues – avant de se porter volontaires – ont reçu l’assurance que le site montilien disposait des protections requises (gel, gants, masques). Mais lors de leur prise de poste, elles n’ont pu que constater le manque de matériel. Certains ont fait jouer leur droit de retrait.

Pour se conformer aux recommandations gouvernementales, Amazon dit privilégier depuis le 23 mars la vente en ligne de produits de première nécessité, type gel, savon, etc. Or la firme de Jeff Bezos ne propose qu’une offre faible en la matière. Elle n’entend par ailleurs pas se priver du boom de commandes enregistrées depuis le début de la crise sanitaire. Certaines catégories connaissent des pics d’augmentation de plus de 100 %. Interrogé sur cette situation tendue dans les différents sites, Amazon dit travailler dans le strict respect des recommandations émises par les autorités, le ministère du travail et les agences de santé locales.

Robin Carcan

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